Voici une seconde mini-fic. Bien moins drôle que l'autre, assez poignante en fait. Pour les amateurs de tragédie...
Disclaimer : tout est à Masashi Kishimoto.
Genre : One-shot/Drame
Le Drame de trois vies
Etrange sensation. Je me sens bizarre. Peut-être plus légère ? Oui, c’est ça, je suis beaucoup plus légère, comme si le poids de mon corps avait complètement disparu. Je n’ai pas mal. A vrai dire, je ne sens rien du tout : pas une odeur, pas une caresse, rien, comme si j’avais perdu mes cinq sens. Ma vue est-elle encore avec moi ? Je n’ai qu’à ouvrir les yeux pour le savoir.
Tout est blanc autour de moi. La lumière est éblouissante. Peu à peu, la luminosité semble s’apaiser et je commence à distinguer les contours d’une pièce. Des bruits me parviennent. D’abord, il y a ce « bip » qui se répète sans arrêt. C’est un tout petit bruit plutôt irritant. D’où cela provient-il ? Et puis, il y a autre chose : des voix, très lointaines, peut-être appartenant à un autre monde.
– Dépêchez-vous, on va la perdre !
Cette voix, je la reconnais. C’est celle de Tsunade-sama. Mais de qui parle-t-elle ? Mes yeux s’habituent enfin à la lumière. La pièce est entièrement blanche. Je suis allongée sur un lit de la même couleur que les murs. Il y a plusieurs personnes autour de moi, à commencer par Tsunade-sama. La pauvre a l’air complètement paniqué. Elle me jette des regards terrifiés. Pourtant, je sais qu’elle n’a pas peur de moi. Alors pourquoi cette panique ?
A ses côtés, Shizune tente de l’aider mais elle aussi semble choquée. Elles me fixent toutes les deux du même regard. Les deux infirmiers à leurs côtés en font autant. Aucun d’eux n’a l’air rassuré.
Je suis donc à l’hôpital. Mais comment y suis-je arrivée ? Je ne m’en souviens pas. Tsunade-sama continue de paniquer. Elle pense que je suis toujours inconsciente. Pourtant, mes yeux sont ouverts. Ne les voit-elle pas ?
– Tsunade-sama, je suis réveillée.
C’est étrange, ma voix ne semble même pas l’atteindre. Pourtant, elle fait attention à chaque mouvement de mon corps, à chaque battement de mon cœur. Tiens, ça aussi, c’est étrange : je ne sens plus mon cœur. Qu’est-ce qui se passe ? Je commence à avoir peur.
Je ne supporte plus cette situation. Voilà plusieurs minutes qu’ils s’agitent autour de moi et ils ne remarquent même pas que je suis éveillée. Finalement, décidée à mettre un terme à cette mascarade, je me lève. Et là, c’est l’horrible découverte.
Je viens de passer à travers le bras de Tsunade-sama ! Je ne l’ai même pas senti, c’est comme si je n’étais que vapeur d’eau. Elle ne m’a pas vue me lever et maintenant elle fixe un point dans mon dos. Alors, tremblante de peur, je me retourne.
Un cri d’horreur s’échappe de ma gorge et, pourtant, nul ne l’entend. Mon propre corps est allongé sur le lit. Ce n’est pas possible ! Mon esprit se serait séparé de lui ? Mais alors, suis-je morte ? Pas tout à fait. Je vois l’oscilloscope relié à mon pouls qui affiche encore quelques battements. C’est lui qui n’arrête pas de biper. Il y a un « bip » pour un battement et j’ai l’impression que mon cœur ne bat plus très vite.
La main tremblante, je m’approche de mon corps. Je ne peux même pas le toucher car mes doigts passent au travers de ma chevelure rose sans trouver la moindre forme de résistance. Mes yeux sont clos et la sueur recouvre mon front. Je n’ose même pas observer en détail mes côtes. Le drap qui les recouvre est taché de rouge. Mes vêtements le sont aussi, d’ailleurs. Qu’a-t-il bien pu se passer ? Il faut que je m’en souvienne.
Voulant faire le point, je m’assois dans un coin de la salle. Enfin, cela n’est dû qu’à l’habitude car je ne sens ni le mur, ni le sol. Mais ce n’est pas le moment de se demander comment sont faites les limbes, en supposant que je sois coincée entre vie et mort. Je force ma mémoire et essaye de faire réapparaître dans ma tête des images disparues. Des souvenirs, des sensations et le sentiment d’une grande peur affluent à mon cerveau. Ça y est, je me souviens.
Je suis sur le toit de l’hôpital. Une scène effrayante s’offre à moi. Naruto et Sasuke se battent avec une fureur incontrôlée. Il me semble qu’ils vont bientôt s’entretuer. Les clones de Naruto recouvrent le sol, si bien que je ne peux plus voir les draps blancs étendus sur la terrasse. Sasuke, lui, vient de se débarrasser du véritable Naruto alors qu’il était dans les airs. A présent, il se retourne et exécute un jutsu Katon. Il ne faut que quelques secondes aux flammes pour recouvrir entièrement le sol.
Paniquée, je cherche Naruto des yeux. Où est-il ? En dehors de ce carnage ou au beau milieu du brasier ? Mon cœur bat à tout rompre dans ma poitrine. J’ai beau aimer Sasuke, je ne lui pardonnerai sans doute jamais s’il tue notre ami.
Les flammes s’estompent et Naruto apparaît au milieu d’elles. Je me sens immédiatement rassurée mais cette joie est de courte durée. Un clone à ses côtés, Naruto a fait apparaître une boule de chakra dans sa main. Sa rotation est telle qu’elle en fait un bruit infernal. Même Sasuke semble impressionné. En tout cas, il l’est suffisamment pour créer un Chidori.
Mes yeux s’écarquillent et mon cœur recommence à tambouriner. Ils vont se tuer ! Le Chidori est la plus puissante technique de Sasuke ! Je les regarde tour à tour. Sasuke est encore en l’air et Naruto, au sol, se précipite vers lui. Le choc va être terrible. Il faut que je les arrête. Sinon, ils vont y laisser leur vie.
– Arrêtez…
Ma voix n’est qu’un supplice aussitôt recouvert par le piaillement des mille oiseaux. Ma gorge se noue et mes jambes tremblent affreusement. Je regarde la scène, impuissante. Naruto et Sasuke continuent de se rapprocher.
– Vous deux… Arrêtez…
Ma voix est à peine plus forte que précédemment et, évidemment, ils ne l’entendent pas. Mes deux meilleurs amis courent droit au massacre. Je n’ai plus le temps de réfléchir. Si je ne fais rien tout de suite, ils mourront. Alors, poussée par une sorte d’instinct, je m’élance vers eux. Je ferme les yeux, terrorisée par ce qui risque de se passer.
– ARRÊTEZ !
Cette fois-ci, c’est un véritable hurlement qui sort de ma gorge. J’ai crié tellement fort que mes cordes vocales me brûlent. Naruto et Sasuke m’ont probablement entendue. Le bruit des attaques se rapproche de plus en plus. Je n’ose pas ouvrir les yeux et, pourtant, je dois voir ce qui se passe. Alors je me force et la scène défile à une vitesse fulgurante devant moi.
Je n’ai pas le Sharingan de Sasuke mais je vois déjà ce qui va arriver avant même que cela ne se produise. Encore un pas et je serai entre les deux attaques. Naruto et Sasuke eux aussi l’ont vu. Leurs visages passent successivement de la surprise, à la panique puis à la terreur totale. Ils essayent de freiner mais n’y arrivent pas.
Je lève les yeux au ciel. Est-ce que ça va faire mal ? Probablement. Vais-je mourir sur le coup ? Qu’est-ce qui m’attend de l’autre côté ? Alors que je suis perdue dans ces questions, j’aperçois une autre silhouette. Je reconnais la coiffure en bataille de notre sensei. Il court vers nous mais il est déjà trop tard.
Les deux attaques me frappent de plein fouet. La douleur transperce ma chair, brise mes os et brûle mes muscles. Il me semble que mon corps vient d’exploser. Naruto et Sasuke sont projetés des mètres plus loin à cause de l’impact. Mes jambes ne me répondent plus, je ne sens plus que la douleur infernale. Elle me tiraille de tous les côtés et cela en devient insupportable. Je ne peux même pas crier, j’ai bien trop mal. Alors, je me sens tomber.
Des bras me rattrapent. La brûlure semble s’intensifier et je sens le goût acre du sang dans ma bouche. Kakashi-sensei me fixe des yeux, terrifié. C’est lui qui me tient. Il m’appelle et me demande de rester éveillée. Mais ce n’est pas la peine car la douleur est trop forte. Alors, avec un dernier sourire et un dernier souffle, je murmure :
– Ça vous apprendra à arriver en retard, Sensei.
Je vois ses yeux s’écarquiller de terreur alors que ma vue se brouille. Je tombe et puis c’est le trou noir.
Je reviens à la réalité. Je suis toujours dans la chambre de l’hôpital et mon corps est toujours devant moi, allongé sur le lit. Alors c’est cela qui m’est arrivé ? J’ai voulu protéger Naruto et Sasuke ? Mais où sont-ils au juste ? Est-ce qu’ils vont bien ? Inquiète, je sors de ma chambre.
Mon corps passe la porte sans même la sentir. C’en est presque effrayant mais je n’ai pas le temps de m’attarder sur des détails. Le spectacle qui s’offre à moi me coupe le souffle que je n’ai plus.
Kakashi-sensei se tient contre le mur, pas dans une attitude nonchalante, mais la tête vers le mur, comme s’il se retenait de se cogner volontairement. Sasuke et Naruto sont derrière lui, assis sur un banc mais il ne leur adresse aucun regard. Leur en veut-il ? J’espère que non. C’est moi, après tout, qui me suis mise entre eux.
Naruto pleure sans pouvoir s’arrêter. Même si je n’en ai plus, cette vision me brise le cœur. Il ne pleure pas comme un enfant qui fait un caprice, ni même comme une personne simplement triste. Il pleure comme quelqu’un qui souffre, qui a mal et qui ne peut plus supporter la douleur que par les larmes. Je ne l’ai jamais vu ainsi. Son visage est déformé par son malheur. Je m’agenouille près de lui, espérant qu’il puisse sentir ma présence, mais c’est peine perdue et ses larmes coulent à flot.
A ses côtés, Sasuke est pâle comme un linge. Il ne bouge pas, ne tremble même pas et ses yeux paraissent vides de vie. Se sent-il coupable de ce qui m’arrive ? Je ne peux pas dire qu’il soit impassible. Sa froideur habituelle l’a quitté pour laisser la place à un immense désarroi. Il semble perdu, comme s’il ne savait plus quoi faire, comme si le sol s’était dérobé sous ses pieds. Il sombre dans un gouffre et personne ne peut le rattraper.
Soudain, Naruto se met à parler. Sa voix est brouillée par les sanglots mais j’arrive tout de même à la comprendre :
– Je suis tellement désolé, Kakashi-sensei… tout est ma faute… Je n’aurais pas dû accepter le duel de Sasuke ! Je n’aurais pas dû utiliser le Rasengan ! Vous savez… c’est moi qui ai commencé… je suis tellement désolé !
Les larmes ne me viennent pas aux yeux et pourtant j’aimerais tellement pleurer. Je voudrais m’approcher de Naruto et le serrer dans mes bras mais je ne peux rien faire. Alors je le contemple, totalement impuissante.
Lentement, je pose mon regard sur notre sensei. Comment va-t-il réagir ? J’ai peur d’entendre ses paroles. Il semble encore sous le choc. Plusieurs secondes passent sans qu’il ne prononce un seul mot. Soudain, il se retourne vers nous. Il ne pleure pas mais ses yeux sont bouffis de fatigue et rouges de tristesse. Il me semble qu’il a pris vingt ans en quelques heures.
– Il ne suffit pas d’être désolé, Naruto, explique-t-il d’une voix tremblante. Tu n’as pas mesuré la portée de ton geste. Tu n’as pas réfléchi aux conséquences. Un ninja doit toujours réfléchir aux conséquences !
Naruto pleure toujours autant mais il trouve la force de répondre :
– Vous trouvez que c’est le moment de faire un cours, Sensei ?
Kakashi-sensei le regarde en soupirant. Il n’y avait aucun sarcasme, aucune colère dans cette phrase. C’était juste des mots pour oublier ce qui venait de se passer.
– A votre avis, qu’est-ce que je vais dire maintenant aux parents de Sakura ? ajoute-t-il en jetant tour à tour des regards à mes deux coéquipiers. Que vous avez blessé leur fille à mort?
Naruto baisse la tête et ses larmes redoublent. Je me mords la lèvre inférieure mais n’en ressent aucune douleur. Pourquoi Kakashi-sensei se montre-t-il si dur ? Pourtant, je ne peux lui en vouloir, il semble vraiment perturbé. Soudain, il tourne les talons et commence à s’éloigner. Va-t-il prévenir mes parents ? J’ai envie de savoir et me mets à le suivre.